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Qu’est-ce qu’un bon vin de terroir ?

Par Willy Kiezer | 4 juin 2019 | Blog | 7 commentaires

Le terroir, cette fameuse expression, revient continuellement dans les discussions entre amateurs de vins et de gastronomie. Le terme est employé par de nombreux vignerons en France et ailleurs, dans leur chai et dans les salons, que l’exploitation soit conventionnelle ou certifiée bio. Il faut d’ailleurs avouer qu’il fait beaucoup rêver. Il nous transporte en Province, dans les terres et dans les vignes. Il nous rappelle l’odeur de la nature, des pins, le bruit des cigales, le soleil et le mistral. Aujourd’hui, avec la révolution du bio et l’arrivée de la biodynamie, beaucoup de débats existent autour du mot “terroir”. Serait-il remis en cause chez certains vignerons  ? Il y aurait ainsi des vins “plus de terroir” que d’autres. Pour tenter de répondre à la question, je vous propose d’abord d’essayer de comprendre ce qu’est le terroir, de le définir. Ensuite, il est nécessaire comprendre quels sont les différents types de viticultures et de vinifications. Après, et seulement après, nous (s)aurons la vérité.

Le terroir : ce que l’on retrouve (plus ou moins) dans notre bouteille

Le concept du terroir, très français, n’a pas vraiment de définition précise et n’est pas concrètement mesurable. Le terroir, c’est un assemblage de plusieurs composantes et de facteurs qui cohabitent ensembles pour créer l’identité d’un territoire. Très souvent, on les définit comme venant du ciel et de la terre. Par exemple avec le type de sol (argilo calcaire, granit) et le climat du lieu (tempéré, océanique). Certains professionnels estiment que le terroir va bien plus loin que ces deux facteurs.

C’est le cas de Stéphane Lagorce, professeur à AgroParisTech et auteur du “Grand précis des vins au naturel”, le terroir se compose des composantes suivantes :

  • Physiques : Zone géographique, topographie, exposition, climatsol ;
  • Végétales : Cépage, cultures associées, enherbement, adventices (herbes qui poussent toutes seules sans la main de l’homme) ;
  • Humaines : Tradition, savoir-faire, usages et coutumes, cahier des charges AOC.

Nous ne pouvons finalement qu’être d’accord avec Stéphane. Ces composantes vont donc, avec plus ou moins d’influence, participer à l’identité d’un terroir. On peut imaginer que le cépage influencera le goût (arômes – longueur), le travail de l’homme, le style, et le climat pour la qualité-quantité. Lequel est le plus déterminant ? Impossible à savoir mais le climat est sans doute l’élément principal dans la qualité d’un millésime.

La mission/magie du vigneron artiste, sera d’extraire tout ce terroir afin qu’il repose dans les bouteilles.

Le terroir de François Plouzeau en Touraine sud


Viticulture et vinification pour saisir et extraire le terroir

Pour Jules Chauvet, célèbre chercheur et vigneron dans le Beaujolais (qui a mené de nombreuses études sur les levures et la fermentation), un vin de terroir c’est 45% de sol et 55% de levures indigènes. Des composantes uniquement naturelles et qui seront trouvées au cœur même de la vigne. Uniquement naturelles certes, mais la main de l’homme doit favoriser correctement ces composantes (et ne pas les diluer). Les bonnes questions à se poser sont donc :

Pourquoi le sol ?

Exemple de Mycorhize

Bien que ce soit la lumière qui apporte le plus d’énergie à la croissance de la plante (via la photosynthèse – Source Christophe EHRHART, consultant en biodynamie), c’est le sol lui apporte les nutriments indispensables à son équilibre et à sa défense. Il offre vie et nourriture à un écosystème composé de millions d’être vivants sur les différentes couches qui le compose. Les vers de terre décomposent la matière organique (feuilles – vie en surface) et les bactéries et champignons mangent les restes (éléments plus petits). Ces nutriments vont permettre à la Mycorhize  d’exister (symbiose entre champignons et racines). C’est cette mycorhize qui permet de créer la quantité et la qualité nécessaires des levures sélectionnées sur la pruine future de la peau des raisins.

Pour finir, sans filtres (sans pesticides de synthèse, trop de cuivre) et avec une bonne gestion (enherbement, travail manuel, engrais verts) cela permettra au type de sol (Argilo calcaire, Gneiss…) de s’exprimer pleinement dans l’élaboration du vin.

Pour en savoir plus sur les méfaits des pesticides de synthèses –> Le rapport des pesticides en France – Ouest France

Pourquoi les levures ?

Cela va de soi… C’est même d’une logique même implacable. Le sol fait son boulot pour créer de bonnes levures et ces dernières finissent le “job” lors la fermentation pendant la vinification.

Pour bien comprendre : plus le sol est propre, bien travaillé sans produits de synthèse, plus l’équilibre du sol sera stable. Cet harmonie permettra de rendre la plante capable de se défendre. Ces conditions favorisent la sélection des levures de qualité qui seront sur la pruine. La levure va permettre à toutes les qualités aromatiques d’un vin  et d’une année de s’exprimer. C’est l’effet origine, l’effet millésime (complexité, longueur, sucre). C’est aussi l’essence du terroir qui se retrouvera dans le moût.

Mini conclusion

Dans la viticulture, l’une des missions du vigneron de garder voire de permettre cette symbiose dans les sols pour ne pas diminuer la quantité et qualité des levures indigènes.

Lors de la vinification, la fermentation devra se réaliser uniquement grâce aux levures indigènes, seules révélatrices du terroir.

Nous pouvons nous interroger sur l’effet des pesticides de synthèse contre la faune et flore de la vigne ou d’un vignoble. Les herbicides industriels, comme le Glyphosate, détruisent tout ou partie de la vie de surface (vers de terre – bactéries). Sans eux, l’équilibre est perturbé. Sans équilibre, il y a moins de biodiversité. La plante peut-donc être soumis plus facilement à des maladies (car moins de vigueur) et le vigneron fera appelle aux fongicides de synthèse (“Folpel” contre le mildiou).

Cet effet pervers a t il pour effet “d’enlever” du terroir dans les vignes ? Très certainement.

A noter que dans le chai, l’hygiène devra être élevée afin d’éviter toutes bactéries (acidité volatile) et toutes levures indésirables (Brett) produisant des déviances aromatiques.

La pruine, pellicule de levures indigènes sélectionnées par le métabolisme de la plante.

Un point sur le conventionnel vs naturel (bio, biodynamie)

Vous le savez peut-être, aujourd’hui, dans le monde du vin, trois modes s’opposent :

Le mode conventionnel (raisonné compris) avec des vignerons qui utilisent encore pesticides de synthèse dans la vigne (à plus ou moins haute dose, bien-sur) et une liste d’intrants (plus ou moins conséquente : correcteurs et stabilisateurs de moûts, acide tartrique etc.) dans la vinification.

Le mode “biologique”, ou le vigneron s’affranchit d’utiliser les produits de synthèse dans les vignes et peut utiliser jusqu’à une quarantaine d’intrants dans l’élaboration du vin (levures oenologiques, colles etc…).

Et enfin, le mode naturel (biodynamie par exemple) où la viticulture est elle aussi travaillée sans produits de synthèse pour permettre au sol d’être vivant et où la vinification se pratique avec levures indigènes et peu ou pas d’ intrant(s) mais quelques sulfites.

Vie des sols en “mode naturel”

Vie des sols avec pesticides de synthèse.


Du coup, qu’est-ce qu’un vin de terroir ?

Un vin de terroir est un vin issu d’une viticulture et d’une vinification peu interventionniste avec des sols peu perturbés par des produits de synthèse et dont la faune épigée et endogée (de surface et de profondeur) a pu s’exprimer pleinement pour créer un équilibre. Le cuivre, utilisé par les vignerons, devra lui aussi être limité.

Autrement dit, un vin de terroir est aussi issu d’une vigne ou la nature a donc pu s’exprimer pour créer toute la richesse possible dont les levures indigènes ont besoin pour faire la fermentation. La viticulture étant “propre”, la vinification devra elle aussi suivre le mouvement, avec le moins d’intrants possibles.

Ces différentes opérations ne permettent pas ou peu de “dilution terroir” dans une bouteille de vin.

Certains vins sont élaborés avec des cépages qui ne pas forcément issus historiquement des vignobles où ils sont produits. Sont-ils moins “terroir” que d’autres ? Pas forcément. Il n’en sont pas moins bons surtout si le vigneron les produits dans les mêmes conditions que les autres, c’est à dire en favorisant le terroir.


SOURCES :

Le grand précis des vins au naturel – Stéphane Lagorce

La corne de la vache et le microscope – Christelle Pineau

Atlas des vins de France – Laure Gasparotto

Entretien avec Christophe EHRHART – Biodyvin France

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